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Prière

Dernière mise à jour : 19 mars

Depuis ce jour de février, comme un présage,

Sur le chemin dans les bois,

Entre la maison et le village,

Nous jouons avec ma fille

A trouver le plus beau galet

Et l'entreposer au bout du chemin

A l'endroit d'une cabane.

Maintenant je sais pourquoi.

Ce qui se dépose finit par s'assembler

En histoire à raconter.


Le lendemain,

D'une bourrasque,

La fenêtre de cette cabane s'est ouverte

Laissant apparaitre

Devant mes yeux ébahis

Deux têtes

Le souffle coupé

Un chevreuil, un sanglier

Tristes trophées

Ne peuvent quitter le mur de mes pensées.


Le troisième jour,

Un galet à la main

Et dans l'autre, celle de ma fille

Se crispe soudain quand

Devant l'entrée de la cabane

Un corps inerte s'étend

C'est un chevreuil...

Ma fille ne détourne pas l'œil

Et lance à ce chasseur droit devant :

"Est-ce que je peux le recueillir ?"

Un regard de plomb tombe sur elle puis l'esquive

Une gêne stupéfaite s'esquisse

Cherche dans mes yeux livides

En vain une branche complice...

Il nous laissera la tête...


Le quatrième jour, le 14 février

Ma fille me tire par le bras

A travers le bois

Et cette partie de moi campée dans l'oubli

S'entraine dans les pas décidés

De celle qui sait...

C'est ainsi qu'avec j'apprends à marcher

Avec des jambes qui vacillent

Vers l'horizon qui se renouvelle

Et nous rassemblons

Ces pierres qui s'éparpillent

Réunies en cet instant figé

Sur le seuil de cette cabane

Et d'une tête lourde déposée...

Mes paupières

Et les doigts tremblants de ma main

Se referment

Sur les doux bois

Aux quatre directions

Je la rapporte

Comme une croix

A la maison.


Le Cinquième jour

Sous la pluie battante

Nos mains sales creusent

Nos mots et nos dessins s'enfoncent

Sans réponse

En cette heure recouverte

Par la terre du jardin.


Le Sixième jour,

Au cœur des bois de la montagne

Dans la pente sous mes pieds une pierre se décroche

Et roule vers le bas

Jusqu'à cette clairière

Jusqu'à cet aboiement soudain.

Devant mes yeux,

Sur un tapis de mousses et de lichens

Le pelage nouveau

D'un chevreuil majestueux.

Il tourne vers moi sa tête sereine

Dévoilant son cou orné de blanc

Et attend un instant

Du coin de son œil brillant

Mon regard déposé

Au fond de ce puits

Dans l'eau nos galets qui scintillent

Et voir bondir par ricochets infinis

La liberté retrouvée.


Le jour Dernier,

La cabane est fermée

Une personne se tient devant l'entrée :

"Vous cherchez des galets ?"

Je voulais répondre "c'est pour les animaux chassés"

Mais j'ai répondu, d'un sourire sans pensées :

"C'est pour ma fille".

C'est la dernière fois que je rencontre quelqu'un

Près de cette cabane.


C'est ainsi qu'en suivant ma fille

Sur le chemin de ce bois

L'instant comme trésor

Que mes peines sont devenues de l'or.

Alors il n'y a plus à souffrir.

Alors il n'y a plus à mourir.

Tant je continue à offrir

Des galets

Encore et En Corps

En Présence

En Silence

En mots soupesés

Avec l'Amour

Pour seule balance.

 
 
 

1 Kommentar


Martine
15. März

Qu'il est beau d'être un homme tout en gardant intact son cœur d'enfant

Cela m'émeut...

Merci John !

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